Thème: Santé
Publié le 23 mai 2025
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Selon les estimations de l’Institut de la statistique du Québec, le quart (25 %) de la population québécoise sera âgée de 65 ans et plus en 2031. Cette brève analyse met en lumière certaines inégalités auxquelles est confrontée la population aînée, notamment au regard du revenu, de la santé, du logement et de la mobilité.
D’importantes disparités au niveau du revenu
En 2022, dernière année pour laquelle des données sur le revenu sont disponibles, le revenu après impôt médian des personnes âgées de 65 ans et plus au Québec était de 30 900 $. Cela signifie que la moitié des personnes aînées vivaient avec un revenu inférieur à ce montant. À titre indicatif, l’Institut de recherche et d’informations socioéconomiques (IRIS) calculait qu’un revenu de 29 577 $ était nécessaire afin de permettre à une personne vivant seule à Montréal de vivre dignement, hors de la pauvreté, cette même année.
Le revenu moyen, quant à lui, était de 37 200 $ en 2022. Les moyennes cachent toutefois des réalités fort différentes. Si on divise la population de personnes aînées en cinq parties égales, on constate que ce revenu moyen tombe à 15 200 $ pour le quintile le plus pauvre, alors qu’il atteignait 69 900 $ au sein du quintile le plus riche. Un écart important est également observable entre le revenu moyen des hommes et des femmes (43 200 $ contre 31 800 $).
Figure 1. Revenu après impôt moyen des personnes âgées de 65 ans et plus selon le quintile de revenu, Québec, 2022

Source : Analyses de l’Observatoire québécois des inégalités basées sur le Fichier de microdonnées à grande diffusion de l’Enquête canadienne sur le revenu 2022 de Statistique Canada.
Ces importants écarts révèlent le rôle déterminant que peut jouer la détention d’un régime de pension privé ou la détention d’épargne personnelle dans la situation financière des personnes aînées. En 2022, 38,4 % des personnes âgées de 65 ans et plus n’avaient pas de revenu de pension de retraite privée et 54,9 % n’avaient pas de revenu de placements. Plus d’une personne aînée sur quatre (27,6 %) n’avait ni revenus de pension de retraite privée ni revenus de placements. Cela représentait 680 000 personnes aînées au Québec en 2022.
Ces personnes aînées qui dépendent uniquement de revenus provenant des régimes publics de retraite doivent composer avec un revenu significativement moindre. En 2022, ces personnes aînées avaient un revenu moyen de 24 500 $, contre 46 100 $ pour les personnes pouvant compter à la fois sur les revenus de pension de retraite privée et des revenus de placements.
Figure 2. Revenu après impôt moyen des personnes âgées de 65 ans et plus selon le type de revenus, Québec, 2022

Source : Analyses de l’Observatoire québécois des inégalités basées sur le Fichier de microdonnées à grande diffusion de l’Enquête canadienne sur le revenu 2022 de Statistique Canada.
Des inégalités sociales de santé marquées chez la population aînée
Ces disparités en matière de revenu sont fortement associées aux inégalités sociales de santé.
En effet, on observe qu’au bas de l’échelle des revenus, les risques sont plus grands de contracter certaines maladies ou de souffrir de certaines incapacités à cause de conditions de vie moins favorables à la santé.
En conséquence, les personnes aînées ayant un faible revenu vivent en moyenne moins longtemps que les personnes aînées ayant de meilleurs revenus, mais aussi moins longtemps en bonne santé. Cette inégalité est particulièrement prononcée entre les 20 % les plus pauvres (1er quintile de revenu) et le reste de la population aînée : l’écart au niveau d’espérance de vie en bonne santé à l’âge de 65 ans atteint près de 3 ans.
Figure 3. Espérance de vie en bonne santé à l’âge de 65 ans, Québec, 2015-2017

Source : Tableau 13-10-0370-01 de Statistique Canada.
Dans un contexte où les inégalités sociales de santé sont aussi marquées, la capacité du système public à répondre aux besoins en matière de soins de santé de la population aînée est déterminante. Or, comme le soulignait la Chaire de recherche Jacques-Parizeau en politiques économiques, seulement 10 % des besoins en soutien à domicile au Québec ont été comblés par le système public en 2023. Selon l’IRIS, cette situation force une part importante de personnes aînées en perte d’autonomie à se tourner vers des services privés souvent inaccessibles. Seulement pour maintenir ce niveau de service (10 % des besoins comblés), la Chaire de recherche Jacques-Parizeau estime que le gouvernement du Québec devra dépenser 10,8 G$ en soins de longue durée d’ici 2030 si aucun virage vers le soutien à domicile n’est effectué.
Des écarts préoccupants en matière de logement
L’accès à un logement abordable constitue un déterminant majeur de la santé, en particulier chez les aînés vulnérables. Or, une forte proportion de personnes aînées vit dans un logement ne rencontrant pas la norme d’abordabilité définie par la Société canadienne d’hypothèques et de logement (SCHL), soit un logement pour lequel le ménage qui l’occupe y consacre plus de 30 % de son revenu avant impôt.
Les frais de logement pèsent particulièrement lourd dans le budget de la population de personnes aînées ayant un faible revenu. Ces dépenses qui incluent le paiement d’un loyer ou d’une hypothèque et diverses charges tel que le chauffage et l’électricité sont qualifiées « d’incompressibles », parce qu’elles ne peuvent être réduite à court terme. Ainsi, plus le logement accapare une part élevée du revenu, moins il y en a pour répondre à d’autres besoins fondamentaux tels que l’alimentation ou les soins de santé.
Au Québec, plus de la moitié (51,8 %) des ménages composés de personnes âgées de 65 ans et plus appartenant aux 20 % les plus pauvres (1er quintile de revenu) consacraient au moins 30 % de leur revenu aux frais de logement, contre seulement 2,6 % chez les 20 % les plus riches (5e quintile). Par ailleurs, cette proportion était également plus élevée parmi certains groupes : elle atteignait 23,0 % dans les ménages où au moins une personne était immigrante, 33,2 % chez les personnes vivant seules et 24,2 % chez les ménages de région métropolitaine de recensement (RMR) de Québec.
Figure 4. Proportion de ménages composés de personnes âgées de 65 ans et plus consacrant 30 % ou plus de leur revenu aux frais de logement selon certaines caractéristiques, Québec, 2021

Source : Analyses de l’Observatoire québécois des inégalités basées sur le Fichier de microdonnées à grande diffusion de l’Enquête canadienne sur le logement de Statistique Canada.
Mobilité : le transport collectif inégalement accessible
Les personnes aînées en situation de vulnérabilité, en particulier celles ayant des limitations fonctionnelles, font face à d’importantes contraintes en matière de mobilité. Un accès adéquat aux services de transport collectif est essentiel non seulement pour accéder aux soins de santé, mais aussi pour favoriser leur participation sociale. Cependant, en l’absence d’un réseau de transport public adapté, de nombreuses personnes aînées doivent se tourner vers des solutions privées comme les taxis ou le covoiturage, qui sont souvent dispendieuses et peu accessibles. De plus, les défis liés à la sécurité et à l’utilisation des outils numériques requis pour organiser ces déplacements accentuent leur isolement et leur dépendance envers leurs proches.
Au Québec, en 2024, plus d’un aîné sur cinq (21,9 %) résidait à plus de 500 mètres d’un arrêt de transport en commun, tous modes confondus (autobus, métro ou train de banlieue). Cette proportion était encore plus élevée dans certaines régions, atteignant 35,8 % dans la RMR de Sherbrooke et 36,3 % dans la RMR de Drummondville.
Figure 5. Proportion de la population de personnes aînées vivant à plus de 500 mètres de tous les arrêts de transport en commun, Québec, 2024

Source : Tableau 23-10-0313-01 de Statistique Canada.
Cette analyse a été produite en partenariat avec l’Association québécoise de défense des droits des personnes retraitées et préretraitées (AQDR).




