Réduire les inégalités de richesse : qu’en pense la population québécoise?

Publié le 3 avril 2024

Les inégalités de patrimoine au Québec sont très élevées, bien davantage que les inégalités de revenus. Elles ont des répercussions sur la santé et le bien-être des individus, particulièrement lorsqu’il est question de l’endettement. Elles se manifestent par des disparités en matière d’accumulation de richesse (immobilier, placements, fonds de pension, etc.) mais aussi d’accès au crédit et d’accès à la propriété. Elles touchent ainsi à plusieurs domaines de politiques publiques.

Quelles sont les pistes de solution qui génèrent actuellement la meilleure acceptabilité sociale pour réduire les inégalités de patrimoine? Pour le savoir, l’Observatoire a conçu une question en partenariat avec l’Association pour la santé publique du Québec qui a été intégrée dans le coup de sonde mensuel réalisé par la firme Léger (voir les résultats complets).

Il en ressort tout d’abord qu’une vaste majorité de la population appuie plusieurs propositions :

  • Bonifier les régimes publics de retraite : 84%
  • Investir massivement dans la construction de logements à but non lucratif sur l’ensemble du territoire québécois : 80%
  • Faciliter l’accès à la propriété résidentielle pour les personnes les moins nanties : 78%
  • Réduire l’écart entre les salaires au sein des entreprises: 74% 
  • Mettre sur pied un impôt sur les fortunes : 67%
  • Faciliter l’accès à du crédit ou à des prêts abordables pour les personnes les moins nanties : 63%

Il est intéressant de constater le soutien important à la mise sur pied d’un impôt sur les fortunes (67%), alors que l’appui est beaucoup plus bas quand on propose de taxer les gros héritages (44%). C’est aussi la proposition pour laquelle il y a plus de d’indécision (11%). L’écart entre ces deux propositions a également été observé dans une étude réalisée auprès de la population française, où l’on constate que la solidarité intergénérationnelle est forte au sein des familles, particulièrement lorsqu’il est question de léguer la maison familiale aux prochaines générations.

Des variations selon l’âge, les revenus et la langue

De façon générale, on constate que l’appui aux propositions s’accroît avec l’âge. Les autres lignes de démarcation principales sont liées aux revenus et à la langue parlée.

Les personnes plus fortunées sont moins favorables que l’ensemble des personnes sondées pour plusieurs propositions, comme on le constate dans le tableau 1. C’est particulièrement le cas en ce qui concerne la taxation des gros héritages (écart de -7 points de pourcentage), l’accès à la propriété résidentielle pour les populations les moins nanties (écart de -6 p.p.), la réduction des écarts de salaire dans les entreprises (écart de -6 p.p.), l’impôt sur la fortune (écart de -5p.p.), l’accès à du crédit ou à des prêts abordables pour les personnes les moins nanties (écart de -5p.p.) et de permettre aux personnes recevant des prestations d’assistance sociale de posséder des biens ou des économies sans que leur prestation soit réduite (écart de -5p.p.).

À l’inverse, les personnes les moins nanties (moins de 40 000$/an) sont légèrement  plus favorables à certaines propositions que l’ensemble des personnes sondées, notamment la facilitation de l’accès à la propriété résidentielle pour les populations les moins nanties (écart de +5 p.p.) et l’impôt sur la fortune (écart de +5 p.p.). Surtout, elles représentent le segment de la population qui est le plus favorable à l’idée de permettre aux personnes recevant des prestations d’assistance sociale de posséder des biens ou des économies sans que leur prestation soit réduite (écart de +13 p.p.). 

 

Les personnes dont le salaire se situe entre 40 000$ et 59 000$ représente le segment de la population où l’on retrouve les plus forts appuis à certaines propositions, particulièrement la bonification des régimes publics de retraite (92%) et la facilitation de l’accès à la propriété résidentielle pour les populations les moins nanties (90%). Ces personnes sont nettement plus favorables à certaines autres propositions que l’ensemble des personnes sondées, soit l’accès à du crédit ou à des prêts abordables pour les personnes les moins nanties (écart de +12 p.p.), la réduction des écarts de salaire dans les entreprises (écart de +8 p.p.) et la mise sur pied d’un impôt sur les fortunes (écart de +6 p.p.). 

 

Tableau 1: Appui aux propositions et écart en point de pourcentage (p.p.) par rapport à l’ensemble des réponses, selon certaines catégories de revenu

Source: Léger, « Actions de réduction des inégalités de richesse, Sondage auprès des Québécois-es », 25 mars 2024.

Notons par ailleurs que la proposition visant à permettre aux personnes recevant des prestations d’assistance sociale de posséder des biens ou des économies sans que leur prestation soit réduite est appuyée par 48% des répondants, mais qu’elle permet de constater une autre ligne de démarcation basée sur la langue, les anglophones et allophones étant favorables à cette proposition dans une proportion de 62%, contre 43% chez les francophones, un écart de 19 points de pourcentage. Les anglophones et allophones appuient beaucoup plus fortement deux autres propositions que les francophones, à savoir la réduction de l’écart entre les salaires au sein des entreprises (écart de +13 p.p.) et l’accès à du crédit ou à des prêts abordables pour les personnes les moins nanties (écart de +11 p.p.).

Alors que se termine le projet de recherche de l’Observatoire sur les inégalités de patrimoine et leurs liens avec les inégalités sociales de santé, ces nouvelles données traduisent un appétit de la population pour la réduction des inégalités de richesse, et ouvrent la porte à de nouvelles analyses qui permettraient de mesurer les coûts et les avantages de différentes politiques publiques pour réduire ces disparités. 

 

Partager la publication

S’abonner à l’infolettre de l’Observatoire

Les inégalités vous interpellent? Abonnez-vous à notre infolettre pour ne rien manquer des publications et événements de l’Observatoire.

Ampoule en 3D sur un rectangle sur fond jaune